Les débats au Québec sur la Charte des valeurs, les « accommodements raisonnables » et le port du foulard (abusivement nommé « voile ») ont montré des relents d’islamophobie. Ailleurs, l’islamophobie fait des ravages et pave la voie à une extrême droite en plein essor. Omniprésente dans le discours public et les politiques de l’État, l’islamophobie est exacerbée par les crimes réels commis au nom de l’islam par une nébuleuse de groupuscules et d’individus « radicalisés ». L’islamophobie constitue-t-elle une mauvaise réponse à une bonne question ou n’est-elle pas, comme sa sœur jumelle, la judéophobie, la résurgence d’un virus social dont la nocivité est notoire et qui opère désormais à l’échelle mondiale ?
Il y a des similitudes étonnantes qui mettent le discours islamophobe contemporain en résonance avec l’antisémitisme, c’est-à-dire la judéophobie. Les judéophobes les plus acharnés ne nient-ils pas jusqu’à l’existence même de l’antisémitisme qui ne serait à leurs yeux qu’une fabrication culpabilisante à propos de persécutions tout à la fois imaginaires et méritées ? Illustration parmi tant d’autres de la parenté de l’islamophobie avec la judéophobie, la question juive d’hier et celle de l’islam d’aujourd’hui relèvent du « délire idéologique » raciste. On ne saurait donc appréhender la réalité de l’islamophobie actuelle sans passer par l’écheveau de l’antisémitisme.
Il ne s’agit pas ici de poser une équation entre la situation des musulmans d’aujourd’hui et celle des juifs d’hier, mais entre deux aberrations racistes qui fonctionnent de façon similaire. Ce qui est au centre des préoccupations de l’auteur, c’est le caractère même des sociétés que le racisme gangrène en menaçant la vie commune.
Coédition avec Syllepse (Paris)